Un immeuble classé en état d’abandon, la mairie a décidé d’agir en entamant une procédure exceptionnelle à l’encontre des propriétaires
Situé 11, rue Fontaine-des-Elus à Blois, à deux pas de la place Ave-Maria, l’immeuble a triste mine. Même les squatteurs n’en veulent pas. Des fils électriques pendouillent, des fenêtres sont défoncées, les oiseaux s’y engouffrent et viennent déposer leurs fientes. «C’est le plus grand pigeonnier de la ville» a t-on entendu mercredi dernier en conseil municipal. Pourtant, d’un point de vue architectural, l’édifice, inscrit à l’inventaire des monuments historiques, présente un joli potentiel. Ce n’est pas un hasard si des investisseurs s’y sont intéressés. Sauf qu’ils s’y sont cassé le nez…
Une bonne affaire qui tourne mal
Jusqu’en 2002, le bâtiment abritait un atelier de forge et de ferronnerie. Son état était vétuste, nullement dégradé. Les nouveaux acheteurs, douze au total, flairent la bonne affaire. D’autant que l’argent investi va leur permettre de défiscaliser par le biais du dispositif Malraux. Réunis au sein d’une AFUL (Association Foncière Urbaine Libre), ils choisissent un syndic, la société Historia Prestige, la maîtrise d’ouvrage déléguée étant confiée à Prestige Rénovation [2 sociétés du Groupe Jean-Charles Jassogne]. Le permis de construire pour la restauration et la création de huit logements est accordé en mars 2005. Le chantier démarre un an plus tard… avant de s’interrompre brutalement en mars 2008. Depuis ? Plus rien. La façade se détériore d’autant plus vite que l’enduit ancien a été gratté dès les premiers travaux.
Des nuisances ne tardent pas à apparaître. Les rats pullulent, les pigeons se multiplient, des bris de verre tombent dans la rue. Exaspérés, les voisins envoient des lettres au représentant des propriétaires installé à Bléré (Indre et-Loire) ainsi qu’au syndic mais ils n’obtiennent pas le plus petit début d’explication. Ils se tournent également vers la mairie qui ordonne à Historia Prestige de mettre en place une protection efficace pour sécuriser les lieux. Il y a un mois, une dératisation et une capture de pigeons ont été effectués. Mercredi, un pas de plus a été franchi avec l’adoption en conseil municipal d’une délibération pour engager une procédure d’abandon manifeste. La démarche n’est pas banale. Si les propriétaires ne réagissent pas, ils risquent l’expropriation. De quoi les réveiller. « C’est une excellente nouvelle se félicitent des voisins. Il est urgent de trouver une issue. »
A Historia Prestige, la procédure d’abandon est accueillie sans affolement. Du moins en apparence. « Rien n’a changé. Les propriétaires vont trouver une solution » nous a assuré une interlocutrice.
Les propriétaires en question sont, eux, restés injoignables. Il semble qu’ils aient été pris de court par les exigences de l’architecte des Bâtiments de France et qu’ils soient depuis en manque de fonds. Henri Brissot
La Nouvelle République
Le 18/12/2010